Nalewki, le cœur de la Varsovie juive

Varsovie (Nom allemand: Warschau) (Nom polonais: Warszawa)
Mazowieckie – (Voïvodie de Mazovie)
Adresse: ul. Bohaterów Getta
Latitude: 52°14’54.49″N – Longitude: 20°59’58.59″E

A la découverte d’une rue disparue, d’un monde disparu

Beaucoup de gens qui visitent Varsovie et cherchent à découvrir, à travers des circuits thématiques, des guides ou des ouvrages, des traces de cette vie juive qui rythmait la vie de la capitale polonaise durant plusieurs siècles prennent souvent conscience de cette impression de vide quand ils comprennent, après avoir parcouru des rues à la recherche d’un improbable vestige, qu’il ne reste que bien peu de traces visibles, qu’il reste en fait très peu de traces.
Aussi une question vient à l’esprit. Est-il possible qu’une population forte de plus de 368 0000 âmes ait pu disparaitre ainsi ? Est-il possible qu’il ne reste pratiquement plus la moindre trace de cette présence autrefois si vivante et active ? Est-il possible que tous les endroits où ces hommes et femmes travaillaient et vivaient aient pu ainsi disparaitre à jamais ? Oui, cela est possible, car cela s’est produit, et la chose est tellement énorme qu’aujourd’hui encore, on a du mal à s’imaginer que cela ait pu se réaliser, et en l’espace de seulement trois années.

Les visiteurs de tout horizon qui viennent en été à Varsovie pour découvrir le festival Singer de la culture juive se réunissent autour du seul espace qui aujourd’hui témoigne de cette présence juive passée, sur la place Grzybowski. Les rares vieux immeubles de la rue Próżna qui débouchent sur la place rappellent que cette rue était pratiquement habitée par des juifs et qu’une partie d’entre-eux devaient se rendre à la synagogue voisine qui a miraculeusement survécu.
Si ces vestiges, pris en photos sous toutes les coutures pour illustrer des articles et des brochures de la Varsovie juive, laissent planer une ombre que l’on recherche en décryptant façades, fenêtres et portes cochères, le véritable cœur de la vie juive de la capitale polonaise était ailleurs, plus au nord, dans le quartier de Muranów.

Muranów1, c’est un des quartiers nord de la capitale, d’ailleurs avant la guerre on parlait du "quartier nord" pour signifier le quartier juif. On disait aussi "Nalewki", car c’était le nom de cette artère qui alimentait par sa vivacité le cœur de la Varsovie juive.

(1) Le nom du quartier de Muranów provient de l’île de Murano située au nord de Venise et dont était natif Giuseppe Simone Bellotti, architecte à la cour des Rois Michał Korybut Wiśniowiecki et Jan III Sobieski et qui édifia en 1686 son manoir auquel il donna le nom de Murano.
Comme beaucoup de ses contemporains italiens qui vinrent en Pologne pour construire et décorer châteaux, églises et synagogues, il dressa les plans de la Basilique de la Sainte Croix (celle qui se trouve en face de l’académie des sciences) et de l’église Saint Antoine de Padoue de Varsovie, le château Leszczyński de Rydzyn et d’autres bâtiments. En 1761 la place Muranowski fut ouverte à l’extrémité nord de la rue Nalewki, à proximité de l’emplacement du manoir Murano qui fut détruit durant la seconde moitié du XIXème siècle. Le manoir se trouvait aux environs de l’ancien dépôt de tramways de Muranów détruit durant la guerre.

Quand on cherche sur un plan la rue Nalewki, on ne la trouve pas. Disons pour être honnête qu’on trouve une petite rue qui déambule entre des immeubles. Mais cette rue là, que l’on a appelé Nalewki certainement pour ne pas complètement oublier le nom, ce n’est pas cette rue Nalewki si particulière qui existait avant la guerre.
Bien sûr, les nazis ont détruit le ghetto et la rue Nalewki qui s’y trouvait, mais celle-là, elle n’est même pas à l’emplacement où se trouvait celle qui courrait jusqu’à la place Muranowski.

En fait, la rue Nalewki, elle n’existe plus…

Le seul tronçon qui existe toujours d’où partait la rue à son extrémité sud s’appelle désormais ulica Bohaterów Getta (La rue des héros du Ghetto, photo ci-dessus).
C’est un morceau de rue sans issue qui longe l’Arsenal aux environs de l’emplacement de l’ancienne grande synagogue Tłomackie.

De la rue, de ce tronçon de rue, il ne nous reste que le revêtement de pavés et les rails des tramways qui filent vers le nord pour venir buter brutalement contre le parc Krasiński à hauteur de l’entrée du jardin, non loin de l’endroit où se trouvait la guérite et la barrière de la porte du ghetto.

C’est tout ce qui reste de la rue Nalewki, rien.

Varsovie - Vestige de l'ancienne rue Nalewki avec l'arsenal sur la gauche
Varsovie - Vestige de l'ancienne rue Nalewki avec l'arsenal sur la gauche

La même rue Nalewki avant la guerre avec l'arsenal sur la gauche et le pasaż Simons sur la droite
La même rue Nalewki avant la guerre avec l'arsenal sur la gauche et le pasaż Simons sur la droite

Rue Nalewki avec l'arsenal sur la gauche et le pasaż Simons sur la droite à l'intersection avec la rue Długa. Il s'agit de l'extrémité sud de la rue. A gauche une pancarte pour un commerce appartenant à M. Grubsztein et à droite un autre appartenant à S. Goldstein
Rue Nalewki avec l'arsenal sur la gauche et le pasaż Simons sur la droite à l'intersection avec la rue Długa. Il s'agit de l'extrémité sud de la rue. A gauche une pancarte pour un commerce appartenant à M. Grubsztein et à droite un autre appartenant à S. Goldstein

La présence juive à Varsovie

La première mention de juifs à Varsovie remonte à 1414. Une petite communauté organisée habitait alors la rue juive (ulica Żydowska) non loin de la vieille ville et était forte de 120 membres. Cependant leur installation fut rendue difficile d’un côté par des difficultés de cohabitation avec les Bénédictins et de l’autre avec les commerçants qui voulaient éviter une concurrence; elle fut limitée dès 1483 aux marchands et seulement les jours de foire.
En 1527, Varsovie fut déclarée De non tolerandis Judaeis 2 lors de son intégration au Royaume de Pologne. Seuls quelques individus et leur famille furent autorisés à résider en ville. La situation s’améliora quelque peu dès 1570 lorsque les juifs furent autorisés à venir commercer en échange du paiement d’une taxe puis ils purent s’installer en ville à partir de 1580 à condition de recevoir un permis.
Avec le temps, ils s’installèrent à certains endroits autour du centre ville dont Nowy Świat, Tłomackie (qui abritera plus tard la grande synagogue de Varsovie) et Nalewki. L’un des plus anciens lieu d’installation des juifs à Varsovie était appelé la Nouvelle Jérusalem (Nowa Jerozolima) qui donnera plus tard son nom à la grande avenue Jerozolimska.
Durant le XIXème siècle, les juifs se regroupèrent dans les quartiers de Muranów, Powązki, Leszno, Grzybów et dans la partie sud de Śródmieście ainsi que dans le faubourg de Praga sur l’autre rive de la Vistule.

(2) De non tolerandis Judaeis : il s’agissait d’un privilège accordé qui limitait ou interdisait aux juifs l’accès à la ville ou à l’acquisition de propriétés. Cependant certaines catégories sociales pouvaient en être exemptées. Lorsque ce privilège était accordé, il entrainait de facto l’expulsion de la population juive de la ville. Cette disposition fut souvent appliquée en Pologne, essentiellement durant une période comprise du XVIème à la fin du XVIIIème siècle. Il est à noter qu’un privilège De non tolerandis Christianis pouvait être octroyé. Ce fût par exemple le cas pour le faubourg juif de Kazimierz où les chrétiens ne purent acquérir de propriétés.

De la rivière Bełcząca à la rue Nalewki

Topographie de la rue Nalewski d'après une carte de Zannoni datée de 1772 (Cliquer pour agrandir)
Topographie de la rue Nalewski d'après une carte de Zannoni datée de 1772 (Cliquer pour agrandir)

Vers la fin du XVIIème siècle coulait une petite rivière (un affluent de la Vistule) que l’on appelait Bełcząca, à l’emplacement de ce qui allait devenir la rue Nalewki. Mais c’est déjà vers le XIVème siècle que l’on avait installé autour de ce ruisseau un système d’acqueduc, de caissons en bois et de barrages qui alimentait en eau potable la nouvelle ville de Varsovie.
Ce n’est que plus tard, au début du XVIIème siècle, qu’on édifia l’église et le cloitre Brygidki au début de ce qui deviendra la future rue Nalewki, sur l’emplacement d’une ancienne chapelle en bois, en face de l’arsenal à l’intersection avec la rue Długa. Plus tard le bâtiment fut transformé en caserne puis démoli pour bâtir au début du XXème siècle le fameux Pasaż Simons.
Les premières constructions d’habitation sont apparues vers la fin du XVIIIème siècle. A cette époque, on trouvait 41 ateliers, 2 brasseries et 21 maisons en bois. La rue était déjà recouverte de pavés. Les maisons en bois furent par la suite détruites lors d’une crue. C’est en 1770 que la rue a été nommée Nalewki et les premiers juifs ont commencé à venir s’installer dès 1780.
Une cour intérieure. © Photo Roman Vishniac - Cliquer pour agrandir
Une cour intérieure. © Photo Roman Vishniac - Cliquer pour agrandir

   
» Visualiser la carte de la topologie de la rue Nalewki
    avant la guerre et aujourd’hui.

Naissance et développement de l’activité

C’est durant le XIXème siècle que les juifs aisés commencèrent à s’installer dans la rue Nalewki déjà fortement juive. Ils venaient d’autres quartiers de la ville, de province, attirés par les affaires durant cette période de développement qu’entrainait la révolution industrielle et les activités commerciales avec la Russie.
Ils firent bâtir de nombreux immeubles de style néo-classique qui tranchaient alors avec les maisons plus modestes qui avaient autrefois remplacé les premières maisons en bois. La physionomie de la rue changea et devint aussi attrayante que pouvait l’être Nowy Świat. D’autres riches propriétaires possédaient des commerces rue Nalewki mais continuaient à habiter plus au sud autour de la rue Marszałkowska, les "Champs-Elysées" de Varsovie.
Des commerces aux devantures soignées et achalandées, des cafés et restaurants attirèrent une clientèle plus distinguée et aisée. Les activités ne cessèrent alors de se développer et avec l’afflux de nouveaux arrivants plus modestes, on commença à manquer de place si bien que les jardins potagers et les parcelles avoisinants furent utilisés pour construire de nombreux immeubles donnant sur des cours intérieures auxquelles ont accédait par les portes cochères de la rue principale et d’autres cours intérieures qui communiquaient entre-elles par de multiples portes et passages pour composer un véritable labyrinthe.
Aux étages s’installèrent les familles et aux rez de chaussée les petits commerçants ouvrirent leur boutique et les artisans leur atelier. Comme dans ces cours il n’y avait pas de locaux commerciaux avec vitrine comme les magasins plus huppés donnant sur la rue, on vit fleurir une multitude d’enseignes qui indiquaient aux visiteurs parfois en plusieurs langues et également par le graphisme pour les éventuels clients analphabètes, l’activité qu’on y exerçait. Comme cela ne suffisait pas à accueillir toute cette animation sans cesse en expansion, les activités emménagèrent aux premiers étages des immeubles et les façades des cours intérieures s’habillèrent de multiples enseignes si bien que le visiteur qui pénétrait dans une cour y découvrait une animation qui s’exprimait à travers les pancartes des boutiques et un incessant va et vient où se mélangeait toute la diversité de la population juive. Des familles entière vivaient alors autour d’une ou plusieurs activités, travaillant soit à leur compte soit pour d’autres.

Le numéro 26 de la rue Nalewki à l'intersection avec la rue Frańciszkańska. L'immeuble sera détruit en 1939 lors des bombardements de la capitale. A gauche la direction vers la rue Gęsia et tout droit vers la place Muranowski.
Le numéro 26 de la rue Nalewki à l'intersection avec la rue Frańciszkańska. L'immeuble sera détruit en 1939 lors des bombardements de la capitale. A gauche la direction vers la rue Gęsia et tout droit vers la place Muranowski.
Le numéro 29 de la rue Nalewki construit durant la première moitié du XIXème siècle et détruit durant l'insurrection du ghetto. Au second plan le croisement vers la rue Gęsia. Au fond, les immeubles de la place Muranowki.
Le numéro 29 de la rue Nalewki construit durant la première moitié du XIXème siècle et détruit durant l'insurrection du ghetto. Au second plan le croisement vers la rue Gęsia. Au fond, les immeubles de la place Muranowki.
Le tramway hippomobile fit son apparition en 1881 et fut remplacé par les tramways électriques en 1908. La rue Nalewki devint la principale artère permettant de relier le centre ville au quartier résidentiel de Żoliborz au nord. 8 lignes de tramways traversaient la rue. En 1928, les bus firent leur apparition.
Rue Nalewki - Scène de rue
Rue Nalewki - Scène de rue

Rue Nalewki - Scène de rue - © Life
Rue Nalewki - Scène de rue - © Life
L’activité commerciale se concentre et bat son plein autour des rue Nalewki, Gęsia et Franciszkańska. Le croisement de ces 3 rues devient l’artère la plus animée de la capitale où s’entrecroisent bus, tramways, camions, voitures, rickshaws, voitures à cheval et chariots à bras. Il y règne une foule bigarrée où se côtoient ouvriers, commerçants, propriétaires, juifs orthodoxes, livreurs (artel), artisans, étudiants de yeshiva, clients et visiteurs, on y parle quasiment qu’en yiddish comme dans tout le quartier de Muranów juif à 90%.
Dès le milieu du XIXème siècle, la rue était déjà pratiquement habitée que par des juifs. On entend également du russe parlé par les "Litwak", ces juifs venus de Lituanie, mais on appelait aussi comme ça ceux qui venaient de Russie et d’Ukraine et qui fuyaient les pogroms. Zailingold un juif originaire d’Ukraine vint s’installer rue Nalewki après les pogroms de 1880 à Kiev et ouvrit une librairie.
Nalewki est le seul endroit de Varsovie où on trouve pratiquement de tout, les marchandises sont réputées bon marché: on y trouve des ustensiles en tous genres, de la nourriture, des livres, des vêtements et fourrures, des tissus, des harengs, des cornichons, de la lingerie, des accessoires divers, des horloges, des bijoux, des oranges en provenance de Jaffa…
Il se concentre uniquement dans la rue Nalewki et ses arrière-cours plus de 700 commerces et ateliers, c’est à dire plus que sur toute la grande avenue Marszałkowska.
Au seul numéro 33 de la rue, d’après un annuaire téléphonique, on recense, sans compter les petites boutiques et autres ateliers : un commerce de vente d’emballages de marchandises appartenant à Aronowicz, un autre de vente de produits en os appartenant à Bajcza, un autre de vente en gros de verre – Apelblat, une maison de vente de fils de coton – Borensztein, des bureaux de transfert et transport – Borychowski, Gelblum, Glezin et les frères Jastrząb, trois commerces de cahiers, livres et papeterie – Glaszmit , Cukier et Kornblum, un magasin de vente d’étiquettes et d’additifs pour l’industrie de la confiserie – Rabinowicz, un stockage de cuivre – Rotenberg, une maroquinerie et produits métalliques – Silman, un négoce d’achat de matières premières de peaux – Pentelki, une fabrique de marque de chaussures – Wurcel, une fabrique de bas Zenit, un atelier de caisses en bois Wandel et Wurcel, une charcuterie – Kornblum et enfin le café Wajnberg.
Rue Nalewki à gauche et rue Frańciszkańska à droite au croisement de la rue Nalewki - Collection starawarszawa.pl - Cliquer pour agrandir
Warsaw - Nalewki and Franciszkanska streets - Jewish life / Rue Nalewki à gauche et rue Frańciszkańska à droite au croisement de la rue Nalewki - Cliquer pour agrandir

» Visualiser une vidéo couleur filmée en 1939 dans une arrière cour du quartier juif de Varsovie.
    (Source : Steven Spielberg Film and Video Archive, United States Holocaust Memorial Museum)

La synagogue et la vie religieuse

Une synagogue progressiste fut établie par Zelig Natanson au numéro 28-30 de la rue Nalewki en 1850. Elle fut transférée au numéro 39 en 1852.
Elle était animée par les rabbins Izaak Kramsztyk et Dow Ber Meisels. La synagogue attirait essentiellement des juifs progressistes (une centaine de familles) et véhiculait des idées d’ouverture et d’assimilation au sein de la Nation polonaise. La synagogue fut détruite durant la guerre.
Izaak Kramsztyk (1814?-1889) enseignant, écrivain, traducteur et rabbin, fut une figure emblématique du mouvement religieux réformé et du rapprochement judéo-polonais au milieu du XIXème siècle. Il dispensait son enseignement en langue polonaise et fut le premier rabbin à prêcher également en polonais (ses prêches furent édités – Kazania Izaaka Kramsztyka – sermons). Il fut un grand activiste lors du mouvement d’indépendance polonaise durant l’insurrection de 1863, lors de laquelle il fut arrêté puis exilé en Lituanie durant une période.
Dow Ber Meisels (1798 – 1878) fut grand rabbin de Cracovie. A Varsovie, il soutint les actions de lutte contre la domination russe et encouragea les mouvements d’assimilations des juifs. Arrêté pour ses prises de position politiques et emprisonné à la citadelle, il du s’exiler à Vienne puis revint à Varsovie où il est enterré au cimetière juif.
Durant les années 1860, les juifs hassidiques se montrèrent très virulents envers les commerçants afin qu’ils ferment leur boutique les vendredi pour respecter la période de Shabbat, de fait, les samedi devinrent des journées extrêmement calmes à tel point que les tramways qui passaient par la rue Nalewki circulaient généralement à vide.

Etudiants de yeshiva à la rue Nalewki en 1928
Etudiants de yeshiva à la rue Nalewki en 1928

Le passage Simons – Pasaż Simons

La construction du passage Simons a été initiée par Albert Simons en 1900 pour contrecarrer l’activité commerciale des rues Nalewki et Gęsia. Ce grand bâtiment commercial à arcades situé à l’extrémité sud de la rue Nalewki (Nalewki 2, Długa 50) s’élevait sur 6 niveaux. Suite à l’indépendance de la Pologne de 1919 et l’arrêt des activités commerciales avec la Russie, l’activité du passage Simons diminua et beaucoup de commerces furent transformés en bureaux.
Le passage Simons abritait des boutiques mais aussi des bureaux et entrepôts aux étages supérieurs. On trouvait également le restaurat gastronomique de Herszfinkiel, le théâtre de marionnettes Azazel, une fabrique réputée de chapeaux pour dames, une boutique de vente de lainages Goldberg et une autre de soie Gutstein.

Le passage Simons (Pasaż Simons) au 2 rue Nalewki
Le passage Simons (Pasaż Simons) au 2 rue Nalewki
L’association de gymnastique sportive Makabi créée en 1915 était le club sportif juif le plus polyvalent de la capitale, elle avait ses locaux au Pasaż Simons. Le club possédait une salle de gymnastique et une salle de boxe d’où venaient les champions boxeurs polonais Shlomo « Finn » Finkelstein et Józef Wysocki. Elle animait également la célèbre équipe juive de football du Makabi Warszawa dont l’un de ses joueurs, Józef Klotz, marqua le premier but de l’histoire de la sélection nationale polonaise.
Le bâtiment fut incendié durant les bombardements de 1939 puis détruit lors de l’insurrection de 1944.
» Voir un panorama du Pasaż Simons durant la guerre.

Le prélude à la guerre

Durant les années 1930 jusqu’à l’entrée en guerre, les conditions de vie des juifs ne cessèrent de se dégrader. La situation économique en Europe devint difficile et se répercuta sur l’économie polonaise. De plus les mouvements nationalistes polonais devinrent plus agressifs envers la communauté juive notamment à partir de 1935 avec la radicalisation du mouvement nationaliste Endecja qui appela au boycott des commerces juifs dans tout le pays, initia des attaques antisémites et facilita l’exclusion des juifs des administrations, des universités et de nombreux postes d’encadrement. On assista à une paupérisation d’une grande partie de la population juive de Varsovie dont une grande majorité vivait sous le seuil de pauvreté.
Lors de son passage en Europe centrale lorsqu’il visita et photographia (découvrir son recueil de photos) de nombreuses communautés juives, Roman Vishniac rapporte que dès 1937 parmi les juifs de la rue Nalewki, des discussions avaient trait aux dangers qui menaçaient les juifs en Europe et les possibilités d’émigrer et d’obtenir un visa pour les États-Unis.

La disparition de la rue Nalewki

La porte du ghetto rue Nalewki et la guérite non loin de l'entrée du parc Krasiński. Cliquer pour agrandir.
La porte du ghetto rue Nalewki et la guérite non loin de l'entrée du parc Krasiński. Cliquer pour agrandir.
Quelques jours après le déclenchement de la guerre, en septembre 1939, la rue Nalewki fut bombardée et de nombreux immeubles furent détruits ou incendiés.
Le ghetto fut établi et fermé le 16 novembre 1940. La rue Nalewki se retrouva enserrée dans la partie nord appelée le grand ghetto. Les tramways continuèrent à traverser la rue jusqu’au 30 janvier 1940, donc relativement peu de temps. Une porte permettant l’accès fut ouverte en décembre 1941 en face de l’entrée du parc Krasiński. Comme dans tout le ghetto, la population juive essaya de s’organiser et de survivre malgré les conditions terribles causées par la faim et les maladies. De nombreux réfugiés, déportés de la région et d’autres villes rejoignirent le ghetto. Les bâtiments communs qui étaient utilisés comme bains et la synagogue accueillirent les réfugiés.
Suite aux dernières grandes déportations de 1942, les soldats SS allemands assistés d’auxiliaires ukrainiens et lettons pénétrèrent dans le ghetto par la porte de la rue Nalewki en janvier 1943 et remontèrent la rue. C’est là et sur la place Muranowski qu’ils subirent leurs premières pertes face à la résistance de l’Organisation juive de combat et de l’Union militaire juive. L’insurrection fut écrasée en avril 1943 et la partie du nord ghetto fut systématiquement détruite maison par maison.
A la fin de la guerre, il ne restait plus qu’un immense champ de ruines. La rue Nalewki n’existait plus.

» Voir une vue aérienne de la rue Nalewki en 1945 (835 Ko).

La rue Nalewki pendant et après la guerre, la rue des Héros du Ghetto (ex rue Nalewki) aujourd’hui.

> Découvrir les abonnés du téléphone de la rue Nalewki pour la période 1938-1939.