Les cimetières juifs dans la région de Białystok

27 et 28 février 2014 – 320 kilomètres – 13 cimetières

Je vais profiter de ces deux jours pour visiter les cimetières juifs qui se trouvent au sud-est et au nord-est de Białystok, le chef-lieu de la voïvodie de Podlachie (Podlaskie), au nord-est de la Pologne, le long de la frontière avec la Biélorussie.
C’est l’hiver, le temps est gris mais l’absence de neige facilitera les déplacements. Curieusement il ne fait pas trop froid pour une fin février, à peine 2 degrés. Les français s’imaginent souvent la Pologne avec un temps sibérien. Cette région reculée de la Pologne m’amènera à traverser des petits villages perdus où le temps semble s’être arrêté, où certaines routes sont encore pavées de pierres et de galets quand ce n’est pas tout simplement des pistes en terre. On rencontre encore beaucoup de maisons en bois comme cela était très majoritairement le cas avant la guerre, même dans les villes comme Białystok où on peut encore en observer. Des maisons en bois alignées perpendiculairement à la route, avec une grange au fond d’une petite cour. On peut aussi encore voir des fermes comme celles qui existaient au début du XXème siècle, avec une cour souvent détrempée et boueuse où picorent des poules, traverse une vache, quelques fois elles sont revêtues de galets aussi, comme du temps du grand-père ou de l’arrière grand-père. Dans ces petits villages perdus au détour d’un virage, je constate que de plus en plus de ces maisons en bois ne sont plus habitées, même si des rideaux sont toujours accrochés aux petites fenêtres. Ce sont des maisons souvent construites au début du XXème siècle ou peut être même avant. Elles possèdent des plafonds bas, des petits pièces et en leur centre trône généralement un imposant chauffage au bois ou au charbon dont les parois sont recouvertes de porcelaine. Autrefois ils servaient à chauffer le logis et à alimenter le feu de la cuisine. Aujourd’hui, les anciens, souvent nés avant la guerre s’en vont et les héritiers ne savent trop que faire de ces biens isolés, éloignés de la ville et inadaptés aux normes actuelles de confort. Alors les fermettes se dégradent et parfois s’écroulent par manque d’entretien. Mais d’autres aussi sont restaurées et entretenues. De l’extérieur, elles sont décorées avec des peintures colorées et parfois des frises en bois qui encadrent fenêtres et pas de portes. Elles possèdent aussi des volets toujours ouverts et peints de couleurs vives, de fait quand on traverse certains petits villages, ces alignements de fermettes colorées égayent ces paysages d’hiver mornes et gris.

Zabłudów

Quand on quitte Białystok par le quartier de Dojlidy, celui-là même où on fabrique la bière éponyme ou la bière Żubr (bison), on se dirige vers la petite ville de Zabłudów où vivait autrefois une importante communauté juive de près de 2000 personnes qui représentait 70% de la population, un véritable shtetl qui abritait la plus grande synagogue en bois du pays, elle avait dit-on près de 5 siècles d’existence. Elle fut incendiée le 26 juin 1941 par les nazis avec une grande partie de la ville dont l’essentiel des maisons étaient construites en bois. Le ghetto fut liquidé et ses habitants envoyés vers Treblinka. Le quartier juif disparut également ce jour là. De même il ne reste plus grand chose du grand cimetière situé au sud de la ville, des alignements de sarcophages défoncés, plus la moindre pierre tombale et au centre s’élève un ohel qui abrite la tombe d’un Tsadik du lieu. Une ferme pas très loin, des champs là ou autrefois s’élevaient des maisons juives détruites durant l’incendie. Plusieurs siècles de présence juive se sont arrêtés ce jour-là. L’histoire de Zabłudów est semblable à l’histoire de tous les shtetls de Pologne, une intense vie communautaire, religieuse, des bourgades où on parlait le yiddish, le polonais, le russe, parfois l’allemand aussi, où se côtoyaient pour certaines des catholiques, des orthodoxes toujours majoritaires dans cette région, parfois des musulmans d’origine tatar également. Il est vraiment très difficile de s’imaginer ce que pouvait être cette vie foisonnante, où ateliers et boutiques étaient essentiellement tenus par des juifs.

Narew

Je quitte Zabłudów pour me diriger vers Narew, une autre petite ville plus au sud, sur la route qui mène vers le parc de Białowieża, l’une des dernières forêts primaires d’Europe qui abrite une petite population de bisons qui vivent à l’état sauvage. Le cimetière juif est situé à 2 kilomètres au sud de la bourgade, perdu au fond d’un bois. Heureusement que le temps est sec sinon l’accès aurait été impossible en voiture avec ce petit chemin de terre qui s’enfonce dans la forêt. La communauté juive était établie depuis 4 siècles et 400 juifs vivaient là à l’entrée en guerre. Dévastée durant le conflit, la synagogue fut ensuite transformée en cinéma puis en une sorte de MJC du temps du communisme, malheureusement elle fut démoli au début des années 70. Le cimetière que je visite fut dévasté durant la guerre et de nombreuses pierres tombales furent utilisées pour paver des rues. Le terrain témoigne encore des dévastations passées. Les quelques pierres tombales visibles sont très anciennes. Comme souvent dans l’est du pays, ce sont des rochers de granit sur lesquels ont été gravés les épitaphes, des blocs de pierre fichés dans le sol, parfois imposants. Moins adaptés par leur forme pour une autre utilisation et plus difficilement transportables, on les a laissé sur place pour récupérer les pierres tombales plus récentes que l’on peut plus facilement réutiliser comme matériaux de terrassement et de construction.

Michałowo

Je reprends ma route et remonte un peu vers le nord pour atteindre Michałowo, une bourgade où habitaient un peu plus de mille juifs avant la guerre, la communauté s’était installée au début du XIXème siècle.

Le cimetière - The cemetery - Michałowo (Cliquer pour agrandir) © www.shabbat-goy.com
Le cimetière – The cemetery – Michałowo (Cliquer pour agrandir)
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Comme à Narew, le cimetière est excentré et situé à 2 kilomètres du centre ville, sur une hauteur dans la forêt. Un panneau indique sa présence, je quitte la route pour m’engager sur un petit chemin qui s’enfonce entre les pins. Un peu plus loin, deux autres panneaux permettent de localiser le cimetière qui se trouve sur la gauche un peu plus loin, dans les hauteurs, à peine visible du chemin forestier. J’effectue un demi-tour et la voiture s’immobilise de travers avec les roues avant qui patinent sur cette partie de chemin enneigé. Habitué à me débrouiller seul, je ramasse des branchages que je positionne sous les roues avant et après quelques tentatives, la voiture s’élance de nouveau sur le chemin de terre verglacé. Je me gare à côté du panneau et je grimpe vers le sommet de la petite colline. Les tombes apparaissent entre les pins, toujours des blocs de granit sur lesquels ont été gravés les inscriptions en mémoire des disparus. Situé en hauteur, le cimetière devait autrefois être dégagé et présenter les alignements de tombes. J’observe que des pierres ont été posées sur la plupart des tombes, ce qui témoigne de visites. Aussi quelques bougies sont visibles au pied de certaines pierres tombales. En cherchant sur le réseau, j’apprends que le cimetière a été restauré par le passé, d’ailleurs certaines pierres tombales ont eu leurs inscriptions repeintes. Voilà un cimetière qui ne sombrera pas dans l’oubli. Je redescends et poursuis ma route vers Gródek, une autre localité pas très loin.

Gródek

Après vingt bonnes minutes de recherche aux alentours du cimetière catholique, je trouve de l’autre côté de la route, légèrement en hauteur, le cimetière juif entouré d’une barrière en bois abîmée à certains endroits. Ici, ce sont surtout les sarcophages des tombes qui sont visibles. Plusieurs sont retournés et présentent leur aspect intérieur, des galets assemblés dans une sorte de moule cimenté qui donne cet aspect caractéristique extérieur. Quelques rochers de granit gravés et un morceau de pierre tombale retient mon attention car dessus est représenté le visage d’un personnage accompagné d’une étoile de David. C’est la première fois que je rencontre une représentation comme celle-là, mais malgré l’aspect ancien, la gravure semble avoir été réalisée dans un deuxième temps. Elle représente le visage d’un homme coiffé d’une casquette à visière. Le graphisme tranche avec le reste de l’inscription. A Gródek, il y avait 1500 juifs durant l’entre-deux guerres. Ils s’étaient installés dès le XVIIème siècle.

Krynki

Je continue vers le nord-est, direction le poste frontière de Bobrowniki. Je remonte une longue file de semi-remorques qui s’étire sur plusieurs kilomètres, les véhicules arrêtés doivent patienter de très longues heures pour se rendre du côté biélorusse. Arrivé à Bobrowniki, je bifurque sur la gauche et continue vers le nord ma route vers Krynki. Une très importante communauté juive vivait là depuis le début du XVIIème siècle, communauté qui s’éleva jusqu’à 6000 personnes au début du XXème siècle, soit les trois-quarts de la population. Le cimetière est l’un des plus grands de la région. Légèrement excentré du centre ville, il est situé sur une hauteur et on y accède par un chemin en terre qui doit être complètement défoncé par temps de pluie. Quelques très vieilles granges et abris en bois longent le terrain de la nécropole qui est encombrée de branchages. De ce côté du cimetière peu de stèles subsistent, des petits blocs de granit que l’on aperçoit entre les branches des arbustes. Il faut remonter la petite colline vers l’ouest, au milieu de la végétation pour pénétrer sur une aire plus dégagée où apparaissent de nombreuses pierres tombales, plus récentes. Elles ne possèdent pratiquement pas de représentations graphiques et de décorations comme cela est plus fréquemment le cas plus au sud. Plusieurs stèles récentes attestent du passage de parents qui ont érigés en ce lieu des pierres tombales à la mémoire de leurs ancêtres. Par-ci, par-là, quelques pierres déposées sur des tombes. Le cimetière est surplombé par l’ancienne cheminée d’une fabrique, reconvertie en pylône pour des antennes de télécommunication. Le cimetière est ceint d’un muret réalisé avec des pierres empilées. Je redescends par un chemin de terre qui longe un champ en observant la petite ville de Krynki. Je repasse par le centre et découvre une ancienne synagogue édifiée au milieu du XIXème siècle, qui fut transformée en cinéma. Elle a conservé son apparence d’antan malgré quelques modifications extérieures. Non loin, une autre synagogue en briques est également visible dans une ruelle pavée à l’ancienne. Le bâtiment abritait également une yeshiva. Ce sont les seules traces de la communauté juive disparue.

Sokółka

Direction le nord-ouest vers Sokółka une bourgade où vivaient plus de 2800 juifs. En 1941, un ghetto et un camp de travail furent établis et la communauté fut déportée vers le camp d’extermination de Treblinka en janvier 1943. Le cimetière est situé non loin du centre ville. Un panneau marque sa présence. On distingue par endroits les restes d’un muret. De nombreux arbustes recouvrent le terrain ainsi que des arbres. Par endroits, des gens ont déposé des ordures, côté ouest, le terrain du cimetière est délimité par un grillage défoncé à plusieurs endroits et des bouteilles gisent ça et là. De nombreuses pierres tombales sont visibles, soit en granit, soit en marbre pour certaines. Je me dis que ce cimetière pourrait être restauré et nettoyé et surtout clôturé. Il est assez grand pour tout dire. L’action du temps érode les inscriptions sur les vieux rochers de granit. Malgré le fouillis des branchages, on voit qu’il a déjà été nettoyé par le passé.

Kuźnica

Je repars vers le nord-est, direction la frontière au poste de Kuźnica où je m’étais rendu une première fois il y 8 ans. Encore de longues files de camions à l’arrêt. Le cimetière est situé à proximité du poste frontière, sur la gauche, un peu plus loin que le cimetière chrétien. Le portail d’entrée est complètement défoncé, certainement un véhicule qui a du faire un demi-tour là. Une cabine de WC à destination des chauffeurs qui patientent de longues heures trône à l’entrée… Il semble que l’on n’ait pas trouvé de meilleur emplacement que le cimetière juif. La superficie de la nécropole est assez grande mais plus rien de subsiste. Sur la hauteur, un bloc de granit s’élève sur lequel devait il y a longtemps se trouver une plaque commémorative disparue depuis. On distingue encore faiblement les traces d’une croix gammée qui a été peinte; a t-elle été effacée ou s’est-elle effacée avec le temps… Le fond du cimetière tient également lieu de latrines pour les chauffeurs de poids-lourds. Sur la droite, on distingue encore 2 élévations sur lesquelles sont enserrées 2 pierres tombales érigées, les 2 dernières du cimetière. Les chevaux du champ voisin s’approchent de moi en me voyant. Je fais le tour du cimetière et trouve une stèle en granit fichée en terre sur laquelle on distingue des inscriptions en hébreu.
La période hivernale permet de distinguer le sol alors que lors de mon premier passage en été, la végétation recouvrait le terrain. Le cimetière est abandonné, malgré le mur d’enceinte avec ses grilles en forme de menorah qui avait été édifié des années en arrière. Le spectacle de l’entrée défoncée et maculée de déchets est vraiment désolant. Les juifs étaient arrivés au début du XVIIème siècle. Ils représentaient plus de la moitié des habitants de la ville et étaient un millier à l’entrée en guerre. Ils furent soit déportés, soit tués sur place. La synagogue fut détruite. Il ne reste plus rien. Seule une petit bourgade sans charme avec de nombreux biélorusses qui viennent faire leurs courses.

Nowy Dwór

Je longe la frontière à travers la campagne, je prends une photo avec mon téléphone du panorama côté est et je la transmets à une amie en Argentine. La ville de Grodno doit être à 12 kilomètres à vol d’oiseaux et autrefois sa famille vivait dans une petite bourgade au sud de la ville avant d’émigrer à la fin du XIXème siècle vers les nouvelles colonies agricoles juives du nord de l’Argentine. Nowy Dwór, c’est le symbole même du cimetière complètement disparu. Il ne reste même pas une pierre, un caillou de la nécropole. Il était situé le long d’une route toujours pavée de galets qui se dirige vers l’est, entre un cimetière catholique et orthodoxe qui eux sont toujours là. Des sapinettes ont été plantées là où gisent peut être encore quelques ossements, un champ labouré occupe une partie de ce qui devait être l’ancien cimetière. Plus rien. Au milieu du XVIème siècle, on recensait déjà une douzaine de juifs à Nowy Dwór. A l’entrée en guerre, il y avait quatre maisons de prières et une petite synagogue vers la place du marché, entre une église et une cerkiew (église orthodoxe). La guerre a pulvérisé quatre siècles d’histoire…

Sidra

Je redescends un peu à l’ouest vers Sidra. 500 juifs environ habitaient là, la moitié des habitants de la ville. Le cimetière est perdu au nord, le long de la route qui mène vers Dąbrowa Białostoka. Heureusement que j’ai un plan, car pour tout dire, il serait introuvable simplement car il ne reste pratiquement rien. A 150 mètres de la route, j’aperçois une petite stèle, c’est là. Je traverse le grand terrain de ce qui devait être autrefois un imposant cimetière. Une pierre tombale a été érigée dans une stèle en granit. Hormis des sapinettes par-ci, par-là, le terrain doit être entretenu car aucune végétation sauvage n’est visible. Je fais le tour de l’ancienne nécropole et j’observe plusieurs rochers en granit. Il faut avoir un œil averti pour déceler sur ces rochers en partie recouverts de lichens des inscriptions en hébreu quasiment effacées par l’action du temps. D’ici dix, vingt ou trente ans, elles auront définitivement disparu. Sidra c’est le témoin de l’absence, un grand terrain vide.

Dąbrowa Białostocka

Je redémarre vers le nord. Durant la seconde moitié du XIXème siècle, les juifs représentaient 85% de la population de Dąbrowa Białostocka, ils étaient arrivés au début du XVIIIème siècle. Une bourgade pratiquement juive, un shtetl en somme, dans la plus pure tradition. Le cimetière est encore présent et ceint d’un mur. On y accède en pénétrant par la cour d’un garage, mais le portail est fermé. Je fais le tour côté ouest, le mur est relativement bas et j’aperçois des briques posées de chaque côté du mur pour en faciliter l’accès. Je pénètre de cette manière dans le cimetière. Côté ouest sur les hauteurs, j’aperçois plusieurs sarcophages avec leur stèle. En redescendant, je découvre de nombreuses pierres tombales, essentiellement des pierres en granit avec leur épitaphe gravée. Vers le milieu du cimetière, un homme d’une soixantaine d’années à l’allure pauvre est en train de scier des grosses branches qui sont tombées au milieu des tombes. Il rassemble du bois qu’il transporte vers l’endroit par lequel j’ai pénétré dans la nécropole, bois qui lui servira sûrement pour alimenter son chauffage. Il me demande si j’ai de la famille enterrée là. Il me dit qu’un peu en retrait il y a une jolie pierre tombale. Il s’agit en fait d’une stèle récente qui a été certainement posée là par des descendants de personnes qui vivaient là. Je me dirige vers le portail qui ferme l’entrée, un mémorial a été érigé par une famille de l’étranger pour rappeler le souvenir de la communauté juive disparue. Le cimetière est parsemé de nombreux arbres mais la quasi absence de broussailles et buissons me laisse penser qu’il doit être régulièrement entretenu.
La synagogue et les maisons de prières de Dąbrowa Białostocka ont été détruites en 1941 lorsque les russes se sont retirés lors de l’opération Barbarossa, quand les allemands ont envahi l’URSS. Voilà un cimetière protégé (Découvrir le cimetière juif de Dąbrowa Białostocka).

Suchowola

Je repars et me dirige vers Suchowola, une bourgade où vivaient 2500 juifs à l’entrée en guerre. La communauté s’était établie vers la fin du XVIIème siècle. Le cimetière situé au nord n’existe plus. Un mémorial récent a été édifié, juste en retrait d’un autre monument plus ancien à la mémoire de 5 polonais tués en 1920 par les bolcheviques. Je fais le tour du terrain où se trouvait le cimetière, mais aucune trace n’est visible, en fait il n’y a plus rien. Seul un fragment de pierre tombale est visible dans l’enceinte d’un groupe scolaire de la ville. Les juifs représentaient la moitié des habitants du lieu. Un ghetto fut établi où furent rassemblés les juifs de Suchowola et d’autres endroits, soit plus de 5000 juifs. En 1941 un progrom fut déclenché avec l’approbation des allemands, durant lequel plusieurs dizaines de juifs furent tués. Le ghetto fut liquidé en 1942. Seuls quelques survivants ont émigrés après la guerre. C’est tout ce qu’il reste des juifs de Suchowola.

Janów

Direction le sud-ouest, vers Janów, je me rapproche peu à peu de Białystok. C’est une petite bourgade où vivaient 2500 juifs à l’entrée en guerre. Les premiers juifs étaient venu s’installer au XVIIème siècle. Durant la guerre, un ghetto fut établi en 1941, puis l’année suivante, les juifs furent pour une partie envoyés vers le ghetto de Suchowalo que je viens de visiter précédemment.

Le cimetière - The cemetery - Janów © www.shabbat-goy.com
Le cimetière – The cemetery – Janów (Cliquer pour agrandir)
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Le cimetière est situé au nord, sur un plateau balayé par le vent, qui domine la ville. Les piliers de l’ancienne entrée du cimetière sont toujours là, on distingue même les charnières qui maintenaient le portail. Mais il n’y a plus de mur d’enceinte. Le terrain fait un hectare environ. Toutes les stèles visibles ont été taillées dans des rochers en granit. Toutes les autres certainement plus récentes ont été réutilisées par les allemands pour terrasser des routes. Les pierres tombales sont très anciennes au vu de l’usure qui efface les inscriptions en hébreu. Sur quelques-unes, des cailloux posés témoignent de passages. A un peu plus d’un kilomètre de là, on distingue le clocher de l’église. Le cimetière est aujourd’hui entouré de champs. Il y avait à Janów une grande synagogue en bois, elle a été incendiée par les nazis. Le cimetière reste l’ultime trace de la présence des juifs.

Jasionówka

Le cimetière - The cemetery - Jasionówka (Cliquer pour agrandir)  © www.shabbat-goy.com
Le cimetière – The cemetery – Jasionówka (Cliquer pour agrandir)
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Un peu moins de 2000 juifs vivaient là à l’entrée en guerre, ils s’étaient installés dès le XVIème siècle. En janvier 1943, ils furent déportés vers les camps de Treblinka et de Majdanek. Le cimetière est situé au nord, sur des hauteurs après le cimetière chrétien, au milieu des bois. Un chemin de terre permet d’y accéder et lorsqu’il bifurque sur la gauche, le terrain du cimetière s’ouvre sur la droite en face. Il faut remonter du côté nord-est pour apercevoir les premières pierres tombales, perdues au milieu de la végétation. Ce sont toutes des stèles en granit, il y a également des sarcophages et des pierres tombales qui ont été entassées à certains endroits, il y a longtemps. Les aiguilles des pins recouvrent les pierres tombales couchées. L’état chaotique du terrain et des stèles érigées de travers témoignent encore de la violence qui s’est abattue sur cette communauté. La population juive de Jasionówka a particulièrement souffert durant la période la guerre.

Retour vers Białystok

La dernière étape devait m’amener à Knyszyn, mais le soir arrivant je renonce à cette destination, non sans avoir repéré la localisation du cimetière. Il reste encore un peu moins d’une dizaine de cimetières à visiter autour de Białystok. A 40 kilomètres à la ronde de là, il devait y avoir au moins entre 35 000 et 45 000 juifs qui vivaient dans ces nombreuses bourgades sans compter la population de Białystok. Il n’y en a plus aujourd’hui. Il reste encore quelques synagogues dont la plus fameuse, celle de Tykocin à 20 km de Białystok.

Synagogue - Tykocin © www.shabbat-goy.com
Synagogue – Tykocin (Cliquer pour agrandir)
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Toutes les synagogues en bois ont été détruites durant la guerre, il n’en existe plus aujourd’hui en Pologne. Les cimetières juifs du nord-est ne ressemblent pas à ceux du sud ou de l’est avec leurs stèles parfois richement décorées ou taillées dans le marbre noir comme à l’ouest. Ici les tombes restent austères comme le voulait initialement la tradition. C’est un sentiment de grand vide qui me reste après ces visites. Si la guerre n’était pas passée par là, se serait un véritable autre monde ici. L’histoire et les communautés étaient tellement diverses que c’est à Białystok qu’est né l’esperanto, sous la plume du docteur Zamenhof, dont le rêve était de créer une langue commune à toutes ces communautés.